Elle estime que rien n’a été fait par les pouvoirs publics depuis les attentats de janvier et appelle à boycotter la cérémonie du 27 novembre. Pour les mêmes raisons, le père d’une autre victime annonce qu’il ne s’y rendra pas non plus.
C’est un cri du cœur. La sœur de François-Xavier Prévost, tué par des terroristes au Bataclan, a lancé sur Facebook un appel au boycott de la cérémonie nationale d’hommage aux victimes, qui doit se dérouler vendredi aux Invalides. Lancé lundi, il avait déjà été partagé près de 16.000 fois trois jours plus tard.
«Merci monsieur le président, messieurs les politiciens, mais votre main tendue, votre hommage, nous n’en voulons pas et vous portons comme partie responsable de ce qui nous arrive! C’est plus tôt qu’il fallait agir», écrit Emmanuelle Prévost, qui ajoute que la famille n’y prendra pas part. La jeune femme estime que depuis les attentats qui ont frappé Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher en début d’année, «rien n’a été fait». «Si des textes ont été votés, aucun décret d’application n’a encore été publié. Dix mois plus tard, les mêmes hommes sont en mesure de recommencer», déplore-t-elle.
Une colère partagée par Jean-Marie de Peretti, père d’une victime du Bataclan. «Quand plus d’un million de personnes ont défilé entre la Bastille et la République, avec les chefs d’Etat, les chefs de gouvernement en tête, je me suis dit “ça y est on va avoir enfin une révolution pour que ces actes barbares ne se reproduisent pas”». Or, il estime qu’il n’y a eu depuis que des «effets d’annonce» et dit avoir «l’impression que rien n’a été fait de concret». À la différence d’Emmanuelle, il n’appelle cependant pas au boycott, estimant avoir pris une simple «décision personnelle».
Les raisons d’une colère
Emmanuelle Prévost a, elle, largement partagé son appel au boycott sur une page d’hommage dédiée à son frère, baptisée «We miss you FX». Parmi les autres raisons de sa colère, elle évoque également le fait qu’en France, «il est possible d’être en lien avec un réseau terroriste, de voyager en Syrie, et de revenir librement». Elle s’attaque aux «personnes fichées S», qui «circulent librement, empruntent n’importe quel moyen de locomotion, louent des voitures, travaillent à nos côtés», et dont la surveillance «n’entraîne aucune action automatique de coercition». Rappelons qu’une fiche S, qui concerne les individus susceptibles d’intenter à la liberté de l’État, est établie par les services de police pour servir d’outil de contrôle et n’est pas une condamnation judiciaire.
Elle dénonce ensuite les «89 mosquées recensées comme étant radicales» en France, «c’est-à-dire qu’elles appellent ou profèrent la haine». Enfin, elle s’élève contre le fait «que les représentants de l’État français ont décidé de mener des raids aériens contre l’État islamiste (sic) en Irak puis en Syrie sans se soucier de préserver, avant d’agir, la sécurité de leurs concitoyens».
«Après le deuil viendra le moment des questions»
Son frère, François-Xavier, avait 29 ans. Il doit être enterré samedi. La famille vient de Lambersart, près de Lille, dans le Nord. Le député-maire de la ville, Marc-Philippe Daubresse (LR), a laissé un message sur la page Facebook: «Onze mois de perdus je suis en colère: on ne peut s’empêcher de se demander combien de vies auraient pu être sauvées si les pouvoirs publics avaient agi plus tôt.»
Au Figaro, il précise ne pas en appeler pour autant au boycott: «En tant que parlementaire, je suis respectueux des institutions de la République, je trouve que le mardi suivant les attentats, l’Assemblée nationale n’a pas eu une attitude digne, j’ai chanté la Marseillaise au Congrès et je voterai toutes les lois que le gouvernement présentera pour lutter contre le terrorisme. Simplement, je m’associe à la douleur de cette famille, et je partage sa colère, qui s’exprime, à sa manière, dans cet appel au boycott. Après ce moment de deuil, vendredi, auquel je participerai, sera créée une commission d’enquête et viendra alors le temps des questions.»